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Delen van artikels

POUR UNE SOCIÉTÉ
 SOUTENABLE, JUSTE ET RÉSILIENTE
COALITION CORONA


Le choc économique du coronavirus provoque une récession mondiale qui implique des interventions massives des Etats pour tenter d’éviter une dépression similaire aux années 1930. Ce choc exacerbe les déséquilibres financiers internationaux et les crises économique, sociale, environnementale et démocratique qui étaient déjà patentes avant la pandémie. Il révèle les vulnérabilités découlant de la mondialisation néolibérale et les pressions sur l’Etat-providence, les services publics et le secteur à profit social depuis quatre décennies. Il rappelle combien, dans un monde interdépendant où les sociétés humaines sont interconnectées, la solidarité internationale est indispensable pour répondre efficacement aux problèmes des uns qui sont également les problèmes des autres.

Comme en 2008, mais pour des raisons différentes, l’Etat est appelé au secours d’un système économique menacé d’effondrement. Plutôt que le retour des politiques keynésiennes, il s’agit d’une nouvelle expérience d’Etat-pompier, appelé dans l’urgence à sauver ce qui peut l’être, mais qui pourrait ensuite être contraint de subir une nouvelle cure d’austérité qui aurait des conséquences économiques, sociales, environnementales et démocratiques désastreuses. L’enjeu consiste au contraire à adopter des mesures à court terme permettant de favoriser une transformation économique à plus long terme, au profit d’un système plus soutenable, juste et résilient. Le bien-être, le droit d’aisance et l’émancipation des citoyens doivent être le moteur de l’action de l’Etat qui doit insuffler, en étroite collaboration avec les différentes composantes de la société, un projet de société durable, inclusif et mobilisateur.

Un tel projet de société doit garantir sur le long terme le bien commun et l’accès universel à une vie digne et à l’égalité des droits, dans le respect de l’environnement et des libertés fondamentales. Dans ce but, l’instauration d’un Etat-providence adapté aux défis économiques, sociaux, environnementaux et démocratiques contemporains représente un enjeu décisif :

  • Un Etat stratège, capable d’inciter les différents acteurs économiques et sociaux à aligner leurs stratégies sur les objectifs de transformation à long terme de l’économie et de la société. Cela implique notamment de ne pas se limiter à sauver sans contrepartie les entreprises de secteurs stratégiques en difficulté, mais au contraire de leur imposer des critères stricts de durabilité. Cela implique également de favoriser la relocalisation et la diversification des chaînes de production dans les secteurs jugés stratégiques.
  • Un Etat régulateur, capable d’instaurer des normes sociales, environnementales et sanitaires aux entreprises et aux institutions financières, afin de faire du commerce international et de la finance mondiale des leviers de développement durable. Les accords de commerce et d’investissement négociés par l’UE doivent poursuivre cet objectif.
  • Un Etat social, capable de garantir le financement de la sécurité sociale et des services publics (à commencer par garantir les droits vitaux pour toutes et tous que sont la santé, le logement, l’eau, l’énergie, l’alimentation), de répartir équitablement les revenus entre le capital et le travail, de réduire les inégalités sociales pour éradiquer la pauvreté, notamment en garantissant que tous les revenus soient supérieurs au seuil de pauvreté et égaux entre hommes et femmes. Si la crise actuelle rappelle le rôle vital que jouent la protection sociale, les services publics et le secteur du non-marchand, elle a rendu visible les métiers essentiels pourtant dévalorisés comme le personnel hospitalier, les caissières, les chauffeurs de transports en commun ou encore les éboueurs, les techniciennes de surface, les éducateurs et éducatrices, etc.
  • Un Etat écologique, capable de protéger les citoyens contre les risques environnementaux et sanitaires, de préserver la biodiversité et de décarboner l’énergie, le transport, l’industrie, l’agriculture et le logement, tel que visé par le Green Deal européen, sur lequel les plans de relance doivent s’aligner.
  • Un Etat démocratique, qui favorise la concertation sociale, la démocratie délibérative et participative, qui associe aux décisions les principaux concernés, qui garantit les libertés publiques, les droits humains et le vivre-ensemble, qui promeut la coopération multilatérale et la solidarité internationale.
  • Un Etat efficace, qui s’assure de la bonne exécution de ses missions et de son impact positif sur le bien-être de la société, et qui veille à une bonne collaboration entre toutes ses composantes.

Une telle perspective implique pour les Etats de disposer des marges de manœuvre budgétaires suffisantes, alors que la crise actuelle provoque au contraire une explosion de l’endettement public. Cela implique des mesures à la hauteur du caractère inédit de la crise actuelle :

  • La mutualisation des dettes : La mutualisation des dettes des Etats membres de l’UE contractées pour faire face à la crise du coronavirus, via l’émission d’euro-obligations, permettrait de réduire les taux d’intérêt des pays plus vulnérables et devrait éviter les conditionnalités contre-productives du MES.
  • La monnaie écologique : La BCE peut acheter des obligations à taux zéro émises par la BEI pour financer des projets environnementaux dans les Etats membres. Vu que la BCE a déjà injecté 2600 milliards EUR entre 2015 et 2018 lors de l’assouplissement quantitatif précédent, il suffirait qu’elle remplace les anciennes obligations arrivées à échéance par de nouvelles obligations environnementales émises par la BEI pour réorienter les fonds vers le financement de la transition écologique et sociale, sans nouvelle création monétaire.
  • L’annulation des dettes : Les titres de dette souveraine achetés par la BCE dans le cadre de l’assouplissement quantitatif sont conservés dans son bilan. Environ un quart de la dette publique des Etats membres est ainsi détenu par la BCE. La BCE pourrait s’engager à conserver cette dette de manière perpétuelle. Elle pourrait même décider d’effacer tout ou partie de cette dette, en passant en charge les créances abandonnées.
  • L’emprunt populaire d’Etat : Les Etats peuvent mobiliser l’épargne domestique en créant des comptes d’épargne spécifiquement dédiés au financement du Green New Deal et rendus attractifs par un rendement garanti et un avantage fiscal. Un emprunt populaire d’Etat pourrait ainsi mobiliser 20 à 30 milliards d’euros en Belgique pour soutenir les PME et financer la transition énergétique, la rénovation des logements, les transports en commun, etc.
  • La justice fiscale : Restaurer un Etat-providence adapté aux enjeux contemporains nécessite de refuser l’austérité et de mettre fin au dumping, à l’injustice et à l’évasion fiscales qui réduisent les marges de manœuvre des Etats. Cela implique de taxer équitablement tous types de revenus des personnes physiques et de les imposer de manière progressive, en exonérant les plus bas revenus ; d’instaurer un impôt progressif sur les revenus du patrimoine et un taux minimum d’impôt des sociétés ; de taxer de manière unitaire sur le plan européen les profits des firmes transnationales, après les avoir répartis entre les différents pays où leurs activités ont eu lieu ; d’instaurer une taxe sur les transactions financières internationales ; d’instaurer une taxe carbone progressive et un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE.
  • La coopération internationale : On ne peut pas résoudre une crise mondiale en laissant de côté la majorité de la population mondiale. La mobilisation en aide au développement de 0,7% du RNB des pays riches, l’annulation de la dette des pays pauvres et l’émission de DTS par le FMI permettrait d’aider les pays en développement à surmonter la crise.

Revaloriser le rôle de l’Etat nécessite par ailleurs de déconstruire le mythe des dépenses publiques excessives. Les discours néolibéral et national-populiste dénoncent de concert le fait que le montant des dépenses publiques équivaut à la moitié du PIB des Etats membres de la zone euro (52% en Belgique). Primo, la majorité de ces « dépenses » n’en sont pas, puisqu’il s’agit de montants qui ne font que transiter par le système de sécurité sociale. Secundo, le PIB ne mesure pas la totalité des dépenses mais la somme des valeurs ajoutées produites, or la valeur ajoutée du secteur public ne représente qu’environ 15% du PIB. Tertio, la somme des dépenses sociales publiques et privées est équivalente dans les différents pays, alors que les premières sont plus justes et efficaces que les secondes (comme l’illustre la comparaison entre les systèmes de santé en Europe et aux Etats-Unis). Les dépenses publiques reflètent en réalité le développement de l’Etat-providence et sont nécessaires à l’instauration d’un Green New Deal garantissant une prospérité soutenable et partagée.

Note de base « Pour une société soutenable, juste et résiliente »
NOTE DE BASE « POUR UNE SOCIÉTÉ SOUTENABLE, JUSTE ET RÉSILIENTE »

Source: https://www.coalitioncorona.be/note-de-base-societe-soutenable-juste-resiliente