COP26: la Belgique doit assumer ses responsabilités en matière de financement climat (Carte blanche du CNCD)
Le succès de la COP26 dépend du respect des engagements des pays riches en matière de financement climat, mais la contribution de la Belgique se fait toujours attendre. Il est impératif que les ministres concernés s’entendent sans tarder sur un engagement à la hauteur des enjeux.
Peut-on se présenter à la COP26 sur le climat à Glasgow sans engagement clair pour soutenir les pays en développement et rester crédible sur la scène internationale ? La réponse est non. Preuve en est : le gouvernement fédéral belge a fait ses comptes et annoncé un soutien financier supplémentaire pour l’année 2022. C’est bien, mais ça ne répond pas aux attentes. La Belgique doit présenter une contribution nationale croissante au financement climat, additionnelle au budget de la coopération au développement.
La Belgique se cache souvent derrière sa complexité institutionnelle et la répartition éparpillée des compétences climatiques pour excuser des engagements décevants. La COP26 n’est pas une COP comme les autres, elle constitue une étape importante dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris. Or, on ne peut espérer aboutir à un succès que si les pays riches remplissent leur part du contrat, à commencer par honorer leurs engagements internationaux en matière de financement climat. La Belgique ne peut se défiler une nouvelle fois.
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« Le changement climatique n’est plus quelque chose qu’on voit seulement à la télévision »
Dans son discours lors l’ouverture de la COP26, le Premier ministre a insisté sur le fait que l’urgence climatique était désormais aussi une réalité pour des pays comme la Belgique. Pour de nombreux pays du Sud, c’est une réalité depuis de nombreuses années, bien qu’ils aient le moins contribué au réchauffement planétaire. Ces catastrophes climatiques tuent, déplacent, affament et appauvrissent des millions des gens chaque année. Par ailleurs, alors que les typhons, sécheresses et ouragans se multiplient et s’intensifient, ils creusent également les inégalités internationales et freinent le développement de nombreux pays à faible et moyen revenu.
L’équité comme pierre angulaire
Ainsi, la lutte contre le réchauffement repose sur le constat d’une injustice profonde : ce sont les pays et les personnes les moins responsables qui en souffrent le plus. Ce diagnostic a été posé dès 1992 et constitue le socle des négociations climatiques. On y a intégré les principes d’équité et de « responsabilité commune mais différenciée » afin de contrebalancer le déséquilibre profond qui existe entre principaux responsables et premières victimes. C’est une condition sine qua non pour avancer de manière universelle sur des questions aussi complexes et interconnectées que celles liées au maintien du réchauffement à maximum 1,5ºC.
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C’est dans ce contexte qu’un engagement collectif pour le financement climat international a été adopté. Lors de la COP15 à Copenhague, les pays développés, contributeurs historiques au réchauffement planétaire, se sont engagés à soutenir les pays en développement pour leur permettre de s’adapter aux conséquences des changements climatiques et d’atténuer leurs émissions. Dans ce but, un montant d’au moins 100 milliards de dollars annuels a été promis, dès 2020.
Il ne faut pas être un observateur chevronné des négociations climatiques internationales pour comprendre que l’enjeu du financement climat est l’enjeu central des discussions. Et à raison : comment espérer pouvoir atteindre collectivement une société décarbonée en 2050 si les pays développés ne reconnaissent pas la dette qu’ils ont contractée en polluant l’atmosphère dès la révolution industrielle ? Comment espérer atteindre les objectifs climatiques sans donner les moyens aux pays en développement de respecter leurs engagements en matière de réduction des émissions ? Sans justice climatique, les objectifs de l’Accord de Paris ne pourront tout simplement pas être atteints.
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Un engagement national et prévisible
A ce stade, la Belgique n’a toujours pas de position commune sur l’atteinte de ses objectifs climatiques et ne dispose toujours pas d’un engagement clair en matière de financement climat. Or la Belgique est non seulement 7e au rang mondial des pays ayant accumulé le plus de CO2 par habitant depuis 1850, mais elle est en outre un des plus mauvais élèves de l’Union européenne en matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. La Belgique doit donc prendre ses responsabilités et adopter un nouvel engagement national. Pas des mesures éparses, où chaque entité décide chaque année de son propre engagement, au fil des potentiels freins et obstacles budgétaires. Prendre ses responsabilités implique de garantir une prévisibilité et un financement de qualité. Prendre ses responsabilités revient à annoncer un chiffre national et pluriannuel. Prendre ses responsabilités, c’est donner un signal univoque aux pays en développement, qui démontre que la Belgique reconnaît son rôle sur la scène internationale et participe à l’effort collectif de la lutte contre le dérèglement climatique.
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Les quatre ministres belges du climat se réunissent ce vendredi pour discuter du partage intrabelge de ses objectifs climatiques. Il est impératif qu’ils s’accordent sur une contribution claire, croissante et juste de la Belgique au financement climat international en amont de leur arrivée à la COP26. Soyons clairs : nous ne parlons pas ici de charité ou de générosité. Nous parlons de justice et de responsabilité