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Julian Assange : la mort au bout du chemin ?

La situation de Julian Assange incarcéré depuis trois ans à la prison de haute sécurité de Belmarsch à l’Est de Londres, surnommée le « Guantanamo britannique » ne cesse de se dégrader au point que l’on craint aujourd’hui pour sa vie.

Rappelons qu’après le jugement de première instance qui donnait raison sur le fond à la partie étatsunienne mais qui interdisait son extradition vers un établissement de mesure administrative spéciale vers les USA, qui consiste en un régime draconien d'isolement complet décrit par les groupes de défense des droits humains comme le "coin le plus sombre" des pénitenciers américains. Les Américains interjetèrent appel de cette décision auprès de la Haute Cour britannique, équivalent de notre Cour d'appel, qui finit par lui donner raison. Ensuite, un recours des avocats d’Assange à la Cour suprême fut refusé par la même Haute Cour, celle-ci ayant reçu des « assurances » de la partie US qui ne valent même pas le papier sur lesquelles elles sont écrites !  Aussi, tout était prêt pour procéder à l’extradition du fondateur de Wikileaks. Il reste cependant un recours possible : un appel sur le fond de l’affaire – la légalité de son extradition plus que contestable, entre autres – auprès de la même Haute Cour. Cependant, elle a aussi le pouvoir de déterminer si cet appel est recevable ! Elle devait se réunir en septembre dernier pour trancher. Depuis plus rien. La crise politique qui secoue la Grande Bretagne et qui est loin d’être terminée malgré la récente nomination d’un nouveau Premier ministre, retarde encore toute décision.

La force de l’amour

Pendant ce temps, la santé de Julian Assange pose de plus en plus de problèmes. Il a été victime d’un léger AVC, il y a quelques semaines. De plus, Assange a été testé positif au Covid – 19. Au lieu d’être hospitalisé, il a été isolé dans sa cellule 24 h sur 24 pendant une dizaine de jours. On a procédé à un nouveau test qui s’est révélé négatif, ce qui permet à son épouse, l’admirable Stella Morris Assange, de lui rendre visite une fois par semaine, ce qui malgré tout lui assure un soutien vital par la force de l’amour.

Stella Morris d'abord avocate de Julian Assange, ensuite mère de ses deux garçons et aujourd'hui son épouse se bat sans relâche pour sa libération.

Stella Morris d'abord avocate de Julian Assange, ensuite mère de ses deux garçons et aujourd'hui son épouse se bat sans relâche pour sa libération.

Dans son ouvrage « L’affaire Assange » paru en français en septembre 2022 aux éditions Critiques, Nils Melzer, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de 2016 à 2022, relate le rapport du Docteur Sondra Crosby, professeure à l’Université de Boston et spécialisée dans l’examen des réfugiés et des victimes de tortures. Melzer fit appel à elle pour examiner Assange lorsqu’il se trouvait encore à l’ambassade d’Equateur d’autant plus que Madame Crosby ne faisait pas partie du camp de ses soutiens. C’était en février 2019 après que le régime équatorien avait changé. Raphael Correa indépendantiste ayant accordé l’asile et puis la nationalité équatorienne à Assange a été renversé par Moreno fort proche des Etats-uniens. Le rapport Crosby qui a fuité sur Internet est accablant ! Il « décrit un homme acculé dont les forces s’épuisent après sept ans de détention. Mal équipée pour un hébergement de longue durée, l’ambassade était devenue un environnement de plus en plus hostile et intimidant pour Assange, avec de graves conséquences pour sa santé mentale et physique. » L’experte dénonce l’exiguïté des locaux dans lesquels Assange est enfermé ainsi que l’isolement social auquel il est soumis avec interdiction de visite, d’usage d’Internet, etc. Crosby dénonce aussi la surveillance de plus en plus étroite qui l’accable. Elle raconte qu’il a fallu mettre au plus haut le volume d’une radio pour couvrir la conversation médicale avec Assange qui pouvait être enregistrée par les caméras, en violation du secret médical. D’ailleurs, ayant dû s’absenter brièvement, ses notes médicales confidentielles ont été subtilisées. Elle les a retrouvées au local des gardiens d’Assange ! Aussi, ses conclusions sont sans équivoque : « Mon avis professionnel est que l’effet synergique et cumulatif des épreuves et de la souffrance infligées à M. Assange – tant physiques que psychologiques – viole les articles1 et 16 de la Convention de 1984 contre la torture. Je pense que les séquelles psychologiques, physiques et sociales seront durables et sévères. »

La traduction française de Hacking Justice de Nils Melzer parue en septembre dernier.

La traduction française de Hacking Justice de Nils Melzer parue en septembre dernier.

Et ses conditions se sont encore plus dégradées après sa violente expulsion de l’ambassade et son transfert à Belmarsch. Assange est mal soigné et surtout subit des soins non appropriés. Tout se passe comme si on le laissait mourir à petit feu. Et en définitive, on peut légitimement se poser la question : n’est-ce pas ce qu’on veut ?

Julian Assange violemment expulsé de l'ambassade d'Equateur. On a volontairement voulu montrer de lui une image hirsute alors qu'il mettait un point d'honneur d'être en tenue impeccable, en lui confisquant son nécessaire de toilete !

Julian Assange violemment expulsé de l'ambassade d'Equateur. On a volontairement voulu montrer de lui une image hirsute alors qu'il mettait un point d'honneur d'être en tenue impeccable, en lui confisquant son nécessaire de toilete !

Un décès « inopiné » arrangerait « tout-le-monde »…

Depuis l’acceptation de l’appel des Etats-Unis auprès de la Haute Cour de Londres, plus rien n’a bougé. Le recours des avocats de Julian Assange devant cette même Haute Cour n’a toujours pas été programmé alors qu’il était prévu en septembre. Tout se passe comme si « on » voulait retarder l’extradition.

Il y a dès lors une hypothèse et elle est plausible. On attend qu’Assange décède dans sa prison. Sa santé s’est tellement dégradée qu’il est à la merci du moindre accident.

Après tout, un décès « inopiné » arrangerait pas mal de monde. Les Anglais d’abord qui n’auraient pas à extrader le fondateur de Wikileaks en ces moments de crise politique et aussi les Etasuniens qui éviteraient un procès sur la base du contestables Espionnage Act en une période politique et une situation internationale également difficiles.  Ainsi, l’affaire serait clôturée !

Mais, rappelons-le : ce n’est qu’une hypothèse et j’espère me tromper !

En tout cas, elle est belle la démocratie occidentale !

Pierre Verhas

 

Bron: https://uranopole.over-blog.com/2022/10/julian-assange-la-mort-au-bout-du-chemin.html