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Delen van artikels

Du coup d'Etat qui a failli emporter le régime Erdogan , le 15 juillet, on peut au moins retenir cette évidence: la Turquie ne répond pas aux normes de l'Union européenne et les négociations pour l'y faire entrer ne sont qu'un leurre. (Plus personne n'y croit d'ailleurs). Le soulèvement d'une partie de l'armée n'a pas été anodin, il aurait sans doute réussi si les mutins avaient pu s'emparer de la personne du président, et empêcher son "appel au peuple". Selon un récit, ils l'ont manqué de peu.

Quel que soit le rôle de la faction Gülen dans l'évènement, il reste que l'armée turque est un foyer de troubles. Il y a eu plusieurs centaines de morts, des bombardements.

Du bon usage du coup d'Etat.

L'AKP, le parti d'Erdogan, n'est pas seulement un parti islamo-conservateur. C'est devenu un parti d'Etat, ultra nationaliste, visant à l'instauration  d'un régime présidentiel autoritaire, dans la glorification du passé ottoman, et en rupture complète avec l'idéologie kémaliste. Erdogan a mis à profit le coup militaire manqué pour procéder à une épuration de masse, non seulement dans l'armée mais dans la magistrature, le corps enseignant, les médias. Des listes de proscription, de toute évidence préétablies, ont été mises à exécution.

Le régime se caractérise aussi par la mise à contribution intensive de la diaspora turque en Europe, jusqu'à l'indécence, avec le concours de politiciens locaux. (1)

Qu'on ne parle pas de "démocrature", terme inepte et vide de sens. Aux élections de novembre 2015, l'AKP, en s'en prenant à deux fois et en jouant sur la lassitude, a obtenu près de 50 pour cent  des  voix, un électeur sur deux. Une base suffisante pour instaurer une quasi dictature. Le Parlement n'est plus un lieu du pouvoir, c'est un élément décoratif. Le principal parti d'opposition, qualifié de pro-kurde, le HDP, a été marginalisé, laminé.

La question kurde.

L'ancien empire ottoman, "l'homme malade" de l'Europe, était pluriethnique. De sa décomposition, la Turquie kémaliste a conclu à une volonté centralisatrice et unitariste. Pour Erdogan encore davantage que pour ses prédécesseurs, les Kurdes, qui peuplent le sud-est de la Turquie, sont des adversaires avec  lesquels on ne négocie pas une solution de type fédératif. Le PKK est classé organisation terroriste presque davantage que l'Etat islamiste. Face à une Syrie en décomposition, à l'abominable régime de la famille Assad, le principal souci d'Ankara est de s'opposer à l'autonomie des Kurdes de Syrie.

L'Etat islamique est bien un Etat...

La frontière turque a longtemps été une passoire pour les "djihadistes" en lutte contre le régime de Damas, lequel ne peut s'appuyer que sur la minorité alaouite et druze de la population syrienne. Depuis 2011, ce régime, assisté par Moscou, a refusé tout processus démocratique, et porte une large part de responsabilité dans l'essor de Daech et du califat, d'ailleurs au départ de l'Irak plus que de la Syrie.

Ce qui distingue Daech des autres composantes de l'islamisme guerrier est moins  son idéologie que sa volonté de contrôler un territoire géographiquement délimité, et qui englobe en Irak la seconde ville du pays, Mossoul. L'armée irakienne est bien incapable de reprendre cette cité, moins combative que les Kurdes face au califat.

Robert Falony - 2 aout 2016

 (1) Parmi les élus belges d'origine turque, le citoyen Emir Kir en est un exemple...

Paru comme « La lettre socialiste » numéro 81, juillet 2016 sur le blog:http://osons.le.socialisme.over-blog.com .