S’il y a une personne avec qui je diverge, c’est bien Nadia Geerts.
Nadia Geerts, enseignante, militante féministe, républicaine, laïque et aussi farouche opposante au port du foulard dans les écoles, est incontestablement une femme courageuse ne concédant rien à ses principes, mais qui exprime souvent des prises de position excessives qui, à mon sens, risquent d’aboutir au résultat inverse à celui recherché.
Par exemple, en ce qui concerne le voile, je considère que militer pour son interdiction en milieu scolaire secondaire ou supérieur risque de mener à un système discriminatoire qui jette de l’eau au moulin des pires ennemis de la liberté de conscience. La laïcité s’accommode mal d’interdits ! En outre, c’est inefficace : cette controverse dure depuis trente deux années et n’a jusqu’à présent mené à rien.
Très bien ! Mais aujourd’hui, le temps n’est plus au débat !
Nadia Geerts est menacée ! Et c’est intolérable !
Nadia Geerts, militante féministe et laïque fait l'objet de graves menaces.
Que s’est-il passé ? Dans un post sur Facebook, elle a proclamé « Je suis Samuel Paty ! ». Samuel Paty, ce professeur des écoles français décapité à Conflans Sainte Honorine parce qu’il a montré une des fameuses caricatures de « Charlie Hebdo » lors d’un cours consacré à la liberté d’expression ( voir Uranopole : http://uranopole.over-blog.com/2020/10/imaginez-vous-un-prof-decapite.html). J’avais constaté : « Deux mondes s’affrontent et dès aujourd’hui en un lieu qui devrait être un havre de paix : l’école. Dès le départ, l’affaire de cette simple leçon dans un collège de la banlieue parisienne a pris des proportions gigantesques dont d’ailleurs les islamistes sont coutumiers. »
Les réactions au poste de Nadia Geerts furent aussi odieuses que dangereuses. Voici ce qu’elle écrit sur son blog :
« Il y a trois mois et quelques jours, j’étais encore un prof heureux. Des cours qui me passionnaient, des collègues sympas, des étudiants avec qui le contact était vraiment bon, un cadre de travail verdoyant (hors covid…). Bref, tout allait bien, ou du moins je pouvais le croire.
Aujourd’hui, je ne vois plus comment continuer, tout simplement. L’affaire Paty, puis la décision de WBE [Wallonie-Bruxelles Enseignement – le pouvoir organisateur] d’autoriser les signes convictionnels en Haute École, ont suscité un flot d’insultes, d’attaques et d’accusations graves à mon encontre qui me mènent à cette conclusion aussi simple que douloureuse : pour beaucoup, mon départ sera un soulagement. »
Oui, Nadia Geerts a peur ! Et elle a raison ! Il y a trop d’exemples tragiques. « Charlie Hebdo » en janvier 2015, un intellectuel de droite, Boris Redeker, qui avait publié en 2006 une tribune dans « Le Figaro » contre les menaces des islamistes, qui vit désormais sous protection policière, le dernier, Samuel Paty en 2020. Molenbeek, un prof suspendu puis réhabilité, suite aux pressions. Cela n’arrête pas !
De beaux esprits diront : Facebook, ce ne sont que des paroles. Il n’y a pas de quoi en faire un plat ! Parmi eux, d’autres proclameront : Nadia Geerts l’a « un peu » cherché ! Oui : elle s’est opposée, à mon avis à tort, à l’autorisation du port du voile dans les établissements d’enseignement supérieur. Serait-ce interdit ? Dans son blog, elle observe que son syndicat ne bouge pas d’un pouce. Elle a eu une réunion avec WBE qui s’est achevée en eau de boudin par une décision qui n’en est pas une. Et puis, elle explique dans le même blog :
« Tout cela contribue à expliquer ce qui fait que depuis l’annonce de la décision de WBE d’autoriser le voile dès la rentrée prochaine, je subis une véritable salve d’attaques. Ce ne sont plus trois, mais des dizaines d’individus, généralement anonymes, certains se prétendant anciens étudiants ayant eu à « subir » mes enseignements, qui m’expriment leur haine, leur dégoût, leur mépris. L’idée selon laquelle je ne devrais pas être autorisée à enseigner domine très largement dans ces messages fleuris, émanant parfois d’individus qui travaillent à présent dans des écoles de WBE et qui sont donc mes « collègues », soumis aux mêmes règles que moi... J’y suis aussi traitée de « sale lesbienne », et l’un de mes agresseurs d’il y a trois mois, dont le réseau social est fort de six mille abonnés, réitère à présent en m’invitant à « aller me faire foutre ».
Rappelons-nous avec Samuel Paty, cela a aussi commencé par des menaces verbales et cela s’est terminé comme on sait !
Aussi, il n’y a pas à tergiverser ! Il faut sauver le soldat – le hussard de la République, en fait ! – Nadia Geerts !
Mais où êtes-vous les syndicalistes ; où êtes-vous, les responsables de l’enseignement, où êtes-vous les politiques : Ahmed Laaouej, François De Smet, Georges-Louis Bouchez si prompt à combattre le port du voile, Paul Magnette, Raoul Hedebouw, Eliane Tillieux, Valérie Glatigny, Caroline Désir, Pierre-Yves Jéholet, Rudi Vervoort et bien d’autres bien silencieux ; où êtes-vous les membres du corps académique : Didier Viviers, Annemie Schaus, Vincent Blondel ? Et la Ligue des Droits Humains, la Ligue de l’enseignement, les sociétés de libre pensée, où êtes-vous ?
Nadia Geerts est bien seule et c’est insupportable !
Voulons-nous sauver ce qui peut encore l’être, porter un coup dur à l’intolérance ? C’est le moment où jamais !
Un seul mot d’ordre : Mobilisons-nous et vite ! Aux armes Citoyens !
Pierre Verhas
Bron: http://uranopole.over-blog.com/2021/01/nadia-geerts-aux-armes-citoyens.html