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Delen van artikels

Les incidents qui ont suivi la manifestation du Front commun syndical à Bruxelles mardi 24 mai et la grève à la SNCB ont déchaîné la presse « d’opinion », ou presse « aux ordres », on peut se poser la question... C’est un haro général sur les syndicats qui seraient à l’origine de tous les malheurs qui frappent la Belgique.

Et cela va même plus loin.

Les échauffourées qui ont eu lieu lors de la dislocation de la manifestation se sont soldées par un officier de police blessé d’un coup donné avec un objet contondant par un syndicaliste ivre. Et cet officier n’est pas n’importe qui ! Il s’agit du Commissaire Vandersmissen connu pour sa conception musclée du maintien de l’ordre.

 

L'agression du Commissaire Vandersmissen : un militant ivre lui assène un coup dans la nuque... Comportement aussi stupide qu'inadmissible.

Il est évident que les médias ont focalisé sur cet incident. Pratiquement rien sur les revendications des travailleurs et les mots d’ordre des dirigeants syndicaux. Il est clair que l’on cherche à diaboliser les organisations syndicales et par ce biais, l’ensemble du monde du travail.

En plus, on pratique la censure !

Ainsi, le jour même une vidéo montrait la réalité des incidents qui – est-ce un hasard ? – ne collait pas avec les relations des différents organes de presse. En effet, on a montré le Commissaire Vandersmissen en train d’asperger au moyen d’un spray de gaz lacrymogène des syndicalistes dispersés. Et puis, on voit l’un d’eux attaquer le policier par derrière, qui s’effondre. Cela apparaît bien évidemment comme une agression gratuite sinon voulue.

Si on regarde bien la vidéo complète, ce n’est pas comme cela que cela s’est passé. Elle fut postée sur Facebook et puis retirée sans motif. Par qui ? Et pour quelle raison ? Voudrait-on cacher une réalité ?

La vidéo censurée sur Facebook

Un correspondant nous a transmis cette fameuse vidéo que nous reproduisons volontiers sur le blog « Uranopole ». Elle dure à peu près 1h 29 minutes.

Regardons.

En premier lieu, on observe des manifestants, boulevard du Midi, se dirigeant vers l’esplanade de la gare du Midi qui est le lieu prévu pour la dispersion. Ensuite, une escouade de policiers accompagnés de deux autopompes s’avance vers eux, avec à leur tête le Commissaire Vandersmissen accompagné de deux policiers en civil dont l’un porte la veste rouge de la FGTB.

Remarquons que les forces de l’ordre interviennent avant que la manifestation ne soit terminée. C’est évidemment cela qui est à l’origine des incidents qui se sont produits.

Ensuite, on aperçoit des policiers en civil s’emparer de manifestants désarmés, les jeter à terre pour procéder à des arrestations. Une jeune femme parvient à leur échapper. Et Vandersmissen sort sa matraque pour « aider » ses hommes. Puis, la caméra filme encore l’une ou l’autre échauffourée et soudain elle se rapproche d’un homme à terre entouré de plusieurs policiers. Il s’agit du Commissaire qui est blessé à la tête. Cela se passe au tout début de la vidéo (de 0 à la minute 1,21).

Le reste de la vidéo montre que la police charge bien avant que les syndicalistes aient eu le temps de se disperser. À la minute 3, 31, on voit un militant CSC saignant de la tête, une cannette de bière à la main, ne comprenant pas ce qui lui arrive. La presse a raconté que cet homme était en état d’ébriété et qu’il était bien l’image du « syndicaliste imbibé et pleurnichard » ! Voilà comment on rapporte les événements !

Puis, l’escouade s’arrête et s’aligne de manière à occuper toute la largeur de la voirie. Policiers et syndicalistes se toisent. À la minute 6,16, les policiers s’avancent. Les manifestants reculent. Et tout le reste est à l’avenant.

Si la présence des forces de l’ordre était nécessaire pour éviter tout débordement, on se demande quelle est la raison de ce petit jeu du chat et de la souris qui a duré une heure et demi avec charges et affrontements avec quelques excités, intervention des autopompes, etc.

La vidéo retirée de Facebook. Des éléments de preuves un peu gênants pour le pouvoir ?

Une fois de plus, la stratégie de la tension ! Il est évident au regard de ce document que l’intervention musclée et massive de la Police de Bruxelles était disproportionnée. Elle ne peut plus invoquer des actes de casseurs comme cela s’est passé l’année dernière. Et c’est sans doute cela qui pèsera dans le procès en comparution accélérée de l’agresseur du Commissaire Vandersmissen.

Réflexions sur la violence

Faisons cependant une réflexion sur la violence. Est-elle nécessaire ? Certes, les violences policières deviennent de plus en plus fortes et dangereuses. Mais, au-delà des jugements moraux, la contre-violence est contreproductive. À quoi sert-elle, sinon à renforcer un adversaire – le pouvoir – qui a pour le moment le rapport de force ?

Le mouvement syndical est le seul qui puisse à la fois canaliser et organiser la révolte populaire et particulièrement celle du monde du travail. Si elle sombre dans la violence, le pouvoir aura beau jeu de déclencher le cycle provocation – répression. Et à tous les coups, dans ce cas de figure, les classes populaires sont perdantes.

Il est indispensable dès lors de décider d’une stratégie dans la riposte aux offensives ultralibérales aussi bien à l’échelle européenne qu’à celle du pays.

Et en matière de provocation du pouvoir, l’exemple de la SNCB (les chemins de fer belges) est probant.

Le lendemain, la direction de la SNCB décide unilatéralement de ne plus payer ou de ne plus permettre la récupération des heures supplémentaires. Tollé chez les cheminots qui décident d’un mouvement de grève spontané qui a commencé jeudi 26, se prolonge aujourd’hui. Et on ignore combien de temps il durera d’autant plus que sur le plan interprofessionnel, une grève générale de 24 heures est décidée pour le mardi 31 mai.

L’enjeu est clair. La direction de la SNCB devance le projet du ministre Peeters qui est le copié collé de la fameuse « loi travail » en France qui fait pour le moment l’objet d’un mouvement de contestation d’une ampleur jamais atteinte.

Les médias serviles se déchaînent.

En outre, les médias se déchaînent. Et en particulier le « Soir » dont on connaît la fibre antisyndicale. Mais ici, c’est le pompon…

Son rédacteur en chef adjoint, François Mathieu, écrit le 26 mai : « On pourrait légitimement s’insurger contre la décision des syndicats du rail de faire fi de l’accord social prévoyant notamment le dépôt d’un préavis de grève au moins 10 jours au préalable. On pourrait gloser sur cette énième grève (…) qui prend les utilisateurs en otage. » Et il ajoute : « On pourrait regretter – et c’est un euphémisme – le manque d’emprise des syndicats sur leurs bases. » Et – ici, il n’a pas tort  :  Mathieu regrette l’absence de dialogue social.

Le lendemain, un autre éditorialiste, Bernard Demonty, en rajoute : « Bien malin qui pourrait résumer l’objet du chaos annoncé [par les syndicats]. Préserver quelques jours de congé pour les cheminots ? Faire sauter la loi Peeters ? Et tout cela au « finish ». Mais pour aller au finish, il faudrait savoir pour quoi on court au juste. Et avec qui : parfois c’est la CGSP, parfois la FGTB, parfois les trois syndicats en même temps. »

Remarquons au passage la confusion en ce qui concerne les organisations syndicales : la CGSP (Centrale Générale des Services Publics) appartient à la FGTB (Fédération Générale du Travail de Belgique) socialiste et n’est donc pas un syndicat autonome. D’autre part, à quel troisième syndicat M. Demonty fait allusion ? La CSC ?

Belle performance pour un journaliste !

La réponse à ces propos destinés à discréditer le mouvement syndical vient de Marie-Hélène Ska, présidente de la CSC, le syndicat chrétien :

« C’est un contentieux qui doit être réglé au sein de la SNCB et qui porte sur les heures prestées, qui ne peuvent pas leur être reprises comme ça en deux coups de cuillers à pot. Lorsque hier, en cours de journée, à l’issue d’une réunion avec les représentants de la SNCB, il est décidé unilatéralement par la SNCB et avec effet immédiat, de reprendre des jours accordés aux travailleurs, il y a rupture de contrat ! »

 

Marie-Hélène Ska, présidente de la CSC (les syndicats chrétiens belges), n'a pas froid aux yeux et son analyse est rigoureuse.

Précisons que Madame Ska a la réputation d’une dirigeante syndicale très réfléchie.

Quant au « manque d’emprise des syndicats sur leurs bases », réjouissons-nous : c’est une preuve que les organisations syndicales se démocratisent et que la direction doit tenir compte de la base. Dès lors, où est le problème ?

Quant à préserver « quelques jours de congé », voici la réponse d’un syndicaliste de la base, René Renard, qui a fait le « buzz » sur Facebook :

« Pour un peu expliquer la réalité, à la SNCB nous sommes payés 36h/semaine. Au roulant, nous effectuons des journées jusqu’à 9h de travail (souvent) et nous pouvons faire 7 jours de travail d’affilée ce qui fait que nous prestons souvent des semaines de 45h voir jusqu’à 63h (ce qui est rare, j’en conviens)

Dans n’importe quelle entreprise, tout le monde trouverait normal que ce surplus d’heure soit soit payé soit récupéré (ce qui est notre cas) mais en écoutant ou lisant les gens sur Facebook, il est anormal que le personnel de la SNCB souhaite continuer à récupérer ces heures et devrait plutôt les prester gratuitement. (Ces gens-là le font-ils dans leur société ?)

Donc au final, nous n’avons pas plus de congé que les autres personnes en régime 36h/semaine en Belgique. Mais comme nous ne faisons pas du 8-16 en semaine on nous croise à des heures inhabituelles pour le commun des mortels. Si on nous voit à 14h on nous dit « il est bien lui ! » Ben oui levé à 1h30 du matin pour bosser à 3h et finir à midi et le lendemain je commencerai à 4h30 pour finir à 13h30 et si tu me croise à ce moment-là « Il est encore en congé ! »

Répression, violences, discrédit, voilà donc les trois volets de l’antisyndicalisme primaire : réprimer toute action syndicale, acculer à une riposte aussi violente qu’inefficace, dénigrer, voire criminaliser le mouvement syndical : on a lu « prise d’otage », « terrorisme syndical », « grèves criminelles », etc. Ce n’est pas le fait du hasard. Cela fait partie d’une stratégie bien élaborée du gouvernement, du patronat qui utilise les médias complaisants.

Mais, admettons que l’on ne voit guère de stratégie du côté du mouvement ouvrier. Il riposte au coup par coup. Il est pour le moment dans l’incapacité à avoir une vision à moyen et à long terme. Il est plus que temps qu’il se réveille !

Pierre Verhas - 27 mai 2016