Mardi dernier, les requérants dans le recours contre le centre commercial Docks Bruxsel recevaient un recommandé du Cabinet Fremault leur notifiant la décision du conseil des Ministres de la Région du 20 avril 2017 retirant, pour la deuxième fois, au centre commercial son permis d'environnement... alors que son exploitation a commencé... En pratique, il aurait dû fermer ses portes. Deuxième recommandé reçu le mercredi 3 mai : la Région prenait le même jour un nouvel arrêté confirmant un nouveau permis d'environnement rajoutant quelques conditions. Rassurant ?
Les associations requérantes et la Plate-forme Interrégionale pour une Politique économique durable ont de longue date dénoncé la façon cavalière avec laquelle Equilis, le promoteur du projet, avait obtenu ses différents permis après maints atermoiements. Permis annulés, permis retirés, permis périmés... Et pour cause : depuis sa naissance, le projet fait couler de l'encre. Il prend place dans une zone d'industries urbaines, sans clientèle proche, a détruit un patrimoine inestimable (les anciennes poêleries Godin), est peu accessible en transport public (surtout pour le public visé venant de la Flandre) et regroupe des enseignes classiques déjà présentes pour l'essentiel à Bruxelles.
Le permis d'urbanisme, le permis socio-économique et le permis d'environnement ont été contestés devant le Conseil d'État. Tant et si bien que le gouvernement régional a retiré le 20 avril dernier, pour la seconde fois, le permis d'environnement afin d'essayer de mieux motiver formellement celui-ci et éviter son annulation. Le site n'est sauvé de l'illégalité que par une pirouette juridique par laquelle la Région réaffirme un permis d'environnement contestable et annulable.
Le nouvel arrêté soumet désormais le demandeur à la rédaction d'un rapport annuel de mobilité incluant la problématique du stationnement. Ce rapport, qui devra être transmis à l'IBGE et à l'Observatoire de la Mobilité, pour la première fois dans la première quinzaine après les 12 premiers mois d'ouverture, devra indiquer l'évolution des parts modales de déplacement ainsi que l'ensemble des mesures mises en place afin d 'atteindre les objectifs fixés.
Cette situation était prévisible dès lors qu'un promoteur fonce dans son projet sans garantie suffisante de son acception par toutes les parties prenantes et que le gouvernement s'acharne à justifier des développements de centres commerciaux périphérique, gaspillant un foncier précieux et générant d'importants flux automobiles. Cette stratégie du fait accompli mène à des situations d'exploitation illégale et à la concrétisation de problèmes annoncés de longues dates par les détracteurs du projet (en termes d'offre commerciale ou de mobilité notamment).
Devant cette situation, le gouvernement bruxellois ferait bien mieux d'imposer des conditions d'exploitation qui permettent une mobilité durable autour du site. Comment garantir que la part de clients qui se rendent dans ce centre commercial en voiture soit de maximum 50 %, comme exigé par le permis d'environnement ? Il faudrait à tout le moins une hausse des tarifs de parkings et des investissements supplémentaires dans les transports en commun et les infrastructures cyclistes.
Rappelons que le projet a été autorisé sur la base de promesses non tenues tant concernant la mobilité que l'offre commerciale alternative. Il est temps que le gouvernement prenne des mesures qui garantissent une bonne mobilité autour du site et tire les enseignements pour les décisions à venir concernant un projet de centre commercial supplémentaire situé un peu plus loin, NEO, qui provoque des craintes similaires. Le troisième projet de centre commercial dans la zone au nord de Bruxelles (Uplace à Machelen) vient de voir son permis d'environnement suspendu par le Conseil d'État... pour des problèmes de mobilité.
Bron: http://www.ieb.be/Docks-Bruxsel-sauve-de-l-illegalite-par-une-pirouette-juridique-les-lecons-a