Richard et Anita sont arrivés à Hanoï fin février.
La crise du coronavirus les y a coincés depuis lors.
Voici leur histoire.
Il faut savoir que le Vietnam a réagi dès mi-janvier à la menace covid-19 : contrôle de température dans les aéroports, fermeture des frontières avec la Chine, isolation des premiers cas, fermeture des écoles.
Et puis tout s’accélérera : certaines rues ont été fermées et désinfectées, puis certains quartiers et villages. Le gouvernement se chargeant de fournir de la nourriture aux habitants isolés.
Nos amis se sont mis en confinement volontaire par peur de contaminer les autres. Ils nous ont fait livrer des masques, nous expliquant leur incompréhension des occidentaux qui refusaient de les porter : « Si vous ne voulez pas vous protéger, protégez la communauté en les portant, en vous lavant les mains, et respectez les distanciations physiques. » Ils ignoraient que si les Belges ne portaient pas de masques, c’est parce qu’il n’en avaient pas et que les autorités sanitaires belges n’en recommandaient pas l’usage.
Nous avons commencé à ressentir une méfiance de plus en plus forte à notre encontre : les Vietnamiens s’éloignaient à notre arrivée, se détournaient.. impossibilité d’entrer dans certains lieux…
Une amie nous aida en nous envoyant tous les jours la traduction des informations. Chaque jour, dans tous les médias, on détaillait le nombre des nouveaux cas, d’où ils venaient, où ils étaient passés… On recherchait des passagers d’avions contaminés, souvent des occidentaux mais aussi des Vietnamiens revenus au pays. Tous devaient se présenter dans des centres spécialisés pour passer des tests ainsi que tous ceux qui auraient pu être en contact avec ces personnes.
Le nombre des cas était limité à une vingtaine mais la réaction gouvernementale fut fulgurante : fermeture totale des frontières, des aéroports, des hôtels.
Nous nous sommes retrouvés à 3 dans un hôtel de 20 chambres, sans personne, ni gérant. A nous de faire le concierge, les femmes de ménage, la gérance. Nous en avons profité pour occuper une chambre de plus, pour en faire un bureau.
Quand le Vietnam a atteint une centaine de cas confirmés, il a tout bloqué : fermeture des provinces, arrêt des transports dans les villes… Tout est fermé sauf les grandes surfaces, les pharmacies, les magasins alimentaires et les marchés. De rares enfants prirent possession des rues, jouant au badminton là où en temps normal il était presque impossible de marcher.
Nous étions seuls, comment allions-nous nous nourrir ? Mais les gens sont formidables. Une vietnamienne est venue à notre secours. Tous les jours elle a fait 10 km à moto pour venir nous ravitailler et nous apprendre quels légumes se mangent crus, lesquels il faut cuire et comment (très étonnée que nous ignorions ce qui lui semblait élémentaire). En contrepartie on lui a appris à faire des crêpes belges, de la mayonnaise et du pain perdu.
On voit des policiers arrêter des jeunes locaux sans masques, pas d’amendes mais obligation de faire des pompes directement sur le trottoir.
Fermeture de la rue où se déroule le marché, prise de température de tous les passants, au sol sont dessinés des grands carrés pour indiquer, par là, l’impérative distanciation physique. Le boulanger vend ses baguettes, rideau quasi fermé, lui à l’intérieur, les clients à l’extérieur. Nous nous promenons dans les rues désertées (le couvre feu n’est en vigueur qu’à partir de 22h). La ville est déserte, sans aucune surveillance.
Et soudainement on apprend que maman se meurt dans son home.
Des amis nous téléphonent via internet tous les jours, ainsi que notre assurance. Nous remuons ciel et enfers pour qu’ils nous aident à rentrer d’urgence. Le ministère des affaires étrangères belge a déclaré qu’il s’occupait de rapatrier tous les ressortissants belges coincés par la pandémie. Notre assurance jette l’éponge, notre ambassade reste fidèle à son inaction déclarée dès les premiers jours. Beaucoup de personnes écrivent comme nous de par le monde sur le site du gouvernement pour réclamer de l’aide. Nous n’aurons ni aide, ni soutien officiel belge ou européen.
Maman décède. Nos amis vietnamiens font un autel des ancêtres pour l’honorer. A l’heure belge de son incinération, nous allumons ici les bougies et encens. Nous l’avons fait durant 7 jours.
La vie à Hanoï est redevenue normale après plus de 40 jours sans aucun cas de maladie. Nous, nous attendons un hypothétique avion. Nos vols ont déjà été annulés trois fois.
Nous terminons en précisant que ce qui s’est passé avec les Belges bloqués aux quatre coins du monde est inacceptable et incroyable au vu des propos officiels tenus aux médias belges. Ils n’ont rien fait. On nous a juste dit « débrouillez-vous tout seuls et signalez-vous quand vous serez rentrés en Belgique » ainsi on pourra vous compter comme rapatriés (sous-entendu par le ministère). On n’oubliera jamais ça !
Anita et Richard
ENCORE, une fois de plus, une marque d’incompétence, si pas de manque de respect de la population, de la part de notre gouvernement actuel ! Nous nous en souviendrons en temps utile.
Source: https://gangdesvieuxencolere.be/2020/06/quand-deux-vieux-gangsters-se-retrouvent-coinces-au-vietnam/