La 50ème ratification du Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires (TIAN) a eu lieu aujourd’hui, ce 24 octobre, à l’ONU. Il s'agit d'un événement historique, le traité prenant effet dans les 90 jours qui suivent cette signature. Les armes nucléaires seront donc très bientôt et officiellement illégales en vertu du droit international !
Ce 24 octobre 2020, trois pays ont ratifié ce traité et porté ainsi le nombre des ratifications aux 50 nécessaires pour valider son entrée en vigueur (consultez la liste des pays qui l'ont déjà ratifié ici) .
Le Traité d'interdiction était adopté le 17 juillet 2017 à l'Assemblée générale des Nations Unies par 122 pays. ICAN, la Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires, fut honorée du prix Nobel de la paix à cette occasion. Trois années plus tard, le Traité d'interdiction entre en vigueur grâce à l’implication constante des équipes d'ICAN et des organisations partenaires dans le monde entier.
Le traité interdit l'utilisation, la menace d'utilisation, le développement, les essais et la production, l'acquisition, la possession, le stockage et le transfert d'armes nucléaires dans les pays qui ont ratifié le traité. Il reconnaît l’importance du Traité de non-prolifération (TNP) dont il constitue la concrétisation de son article VI. De plus, outre les 50 pays qui l'ont ratifié, 84 pays ont déjà signé le traité. Ils ne peuvent dès lors plus en violer les objectifs.
Si l’entrée en vigueur est avant tout contraignante pour les parties signataires, elle aura également un impact sur les pays qui ne l'ont pas (encore) signé. Il s’agit donc bien d’une étape décisive dans l’élaboration d’une norme internationale contre les armes nucléaires. L’histoire récente montre combien une norme internationale forte a aussi un impact moral et politique sur les pays qui ne sont pourtant pas membres de traité d’interdiction (mines anti-personnel, armes chimiques,etc.), ce avec des résultats tangibles et concrets.
« Les armes nucléaires deviennent illégales : la Belgique restera t-elle longtemps un « État voyou ? » Samuel Legros (CNAPD/Coalition)
Le fait que les armes nucléaires deviennent officiellement illégales augmente également la pression morale et politique sur les États dotés d'armes nucléaires et leurs alliés, afin qu'ils tiennent leur engagement de désarmement auquel ils se sont engagés en signant le TNP. L'impact sera également perceptible en Belgique, qui héberge toujours des bombes nucléaires états-uniennes à Kleine Brogel.
Si la Belgique a toujours refusé de participer aux négociations du traité d'interdiction, elle ne peut plus nier sa réalité. Une ouverture prudente était déjà perceptible dans le nouvel accord de coalition du 30 septembre 2020, qui précise : "La Belgique va (...) examiner comment le Traité d'interdiction des armes nucléaires peut donner une nouvelle impulsion au désarmement nucléaire multilatéral".
Nous avons aussi pu constater que le monde financier est sensible à ce type de traité. A l’image de la KBC, qui, à la suite de diverses institutions financières dans le monde, s'est totalement désinvestie des entreprises qui contribuent à la production, à l'entretien ou à la modernisation d'armes nucléaires. Il est évident que le Traité d’interdiction donne déjà un nouvel élan au désarmement nucléaire multilatéral.
« Les manœuvres états-uniennes pour tenter de faire échouer le traité montrent toute son importance, contrairement à ce que les puissances nucléaires en disent » Olivier Galand (Coalition/nonukes.be)
C’est un fait, les armes nucléaires ne disparaîtront pas de si tôt, malgré l’entrée en vigueur du traité. Toutefois cette nouvelle donne influencera très certainement le débat national en Belgique à l’avenir. La Coalition belge contre les armes nucléaires appelle le nouveau gouvernement à saisir l'ouverture que représente l'accord gouvernemental et à signer puis ratifier TIAN dans les meilleurs délais. La Belgique, qui a déjà fait preuve de leadership moral et politique dans le passé en interdisant les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions, peut et doit suivre le bon exemple des pays qui nous précèdent aujourd'hui. Pour cela, notre pays devra renoncer aux armes nucléaires de Kleine Brogel, à la capacité nucléaire des nouveaux avions de combat et à la doctrine illusoire de dissuasion nucléaire derrière laquelle se cache notre pays.
La Coalition belge contre les armes nucléaires, organisation partenaire d'ICAN, est un réseau qui, par son appel, rassemble 67 organisations, dont Greenpeace, Amnesty, Pax Christi, Vrede vzw, CNAPD, Oxfam etc.
Samuel Legros - CNAPD
Olivier Galand - No Nukes