Cela fait des mois que les gouvernements pointent les responsabilités individuelles, sans aborder la responsabilité des employeurs !
La CGSP ALR ACOD LRB BRU a décidé de rompre l’omerta.
Alors que dans d’autres pays, comme la France, les clusters ont été clairement identifiés et montrent que l’endroit où les personnes se contaminent le plus sont les entreprises publiques ou privées, en Belgique, le débat politique consiste à se demander ce qui n'a pas été bien fait à titre individuel pour qu’on en soit arrivé là !
Il semble pourtant évident qu'au quotidien, les travailleurs durant leurs 8 à 10h de travail sont, sans cesse, amenés à prendre des risques : utilisation des transports en commun, non distribution par l’employeur des équipements de protection individuelle adaptés et en suffisance, manque de nettoyage/désinfection des locaux et des surfaces, pas de réactualisation des analyses de risque des postes de travail adaptées à la pandémie covid-19,
pas de véritable politique de testing, tracing, mise en quarantaine (sujet particulièrement grave dans le secteur des soins de santé), absence de la médecine du travail sur la prise en
charge de la problématique du covid-19 sur le lieu de travail, sans compter la situation financière qu’implique le chômage pour force majeure ne donnant droit qu'à 70 % du salaire… Dans ces conditions, la responsabilité individuelle n'apparaît pas comme le principal problème.
Beaucoup de problèmes à signaler. Interventions indispensables des délégations syndicales.
- La ville de Bruxelles a purement et simplement décidé de mettre en chômage temporaire des centaines de travailleurs, les précipitant dans une pauvreté sans nom.
- A Saint-Gilles, l’autorité a refusé aux organisations syndicales de rencontrer les travailleurs afin qu’ils puissent exposer les problématiques de leur quotidien.
- A la propreté publique, afin que soit respectées et appliquées les mesures sanitaires, la section syndicale a dû déposer un préavis d’actions et de grève.
- A Schaerbeek, les plus grandes difficultés se situent au CPAS pour élargir le télétravail et pour mettre en place une vraie politique de traitement des dossiers nécessitant une prise de rendez-vous. Très concrètement, la délégation a même dû intervenir pour obtenir de la solution hydroalcoolique en suffisance et pour faire respecter la distanciation physique dans les locaux.
- Au service de la population à Molenbeek, alors que la Bourgmestre refusait de fermer le service, la CGSP a engagé un bras de fer qui l'a obligée à se rendre sur place avec le SIPP et SEPP (médecine du travail). Sous la pression des travailleurs, elle a finalement fait fermer le service durant 4 jours afin que tout le monde soit testé et mis en quarantaine dans l’attente des résultats avec maintien du salaire.(décision responsable que nous saluons).
- Dans les hôpitaux publics, on constate que de plus en plus de membres du personnel sont malades, symptomatiques ou testés positifs, ce qui crée plusieurs gros problèmes dont le principal est la pénurie de personnel due au manque de financement structurel imposé par les gouvernements successifs. C'est ce qui explique le peu de ressources pour remplacer le personnel malade. La solution proposée par certaines directions ou responsables est
d’imposer aux membres du personnel de venir travailler alors qu’ils sont testés positifs et/ou en quarantaine dans l’attente des résultats. Nous avons donc du personnel contaminé qui prend en charge à l’hôpital des patients fragiles, immunodéprimés, des personnes âgées...
La CGSP interpelle les autorités depuis plusieurs mois sur une procédure claire de testing, tracing, quarantaine au sein des institutions pour que les soignants ne se contaminent pas entre eux. Force est de constater que nos demandes n’ont jamais été rencontrées et que la situation sur le terrain avoisine la catastrophe.
LE 9 OCTOBRE, la CGSP ALR Bru a fait une petite action devant le SPF Santé et Bien-être au travail pour dénoncer toutes ces situations
Un article sur le sujet publié sur notre page facebook (CGSP ACOD ALR LRB) explose les compteurs et a été consulté et partagé, à ce jour, 66.000 fois, c’est de loin la publication la plus visionnée. Cela montre bien que le problème est criant sur les lieux de travail. Depuis de nouveaux articles ont paru dans la presse, et nous avons été reçus sur le plateau de « C’est pas tous les jours dimanche » où nous avons dénoncé les manipulations de certains employeurs, qui transforment les recommandations de SCIENSANO (1) pour obliger les
travailleurs à venir travailler alors qu’ils sont testés positifs, en quarantaine ou même malades avec de faibles symptômes.
Pour la CGSP, la lecture des directives de Sciensano est claire :
- En cas de contact à haut risque : il est exceptionnellement possible de venir travailler SI ceci est nécessaire pour garantir la continuité des soins.
- Si le membre du personnel répond à la définition d’un cas possible ou confirmé, il doit être testé et mis en quarantaine pour minimum 7 jours. Ceci nous semble complètement différent des consignes envoyées par certaines directions !
Jamais personne ne s’est posé la question de savoir si les hôpitaux qui pratiquaient la remise au travail de membres du personnel sans respecter strictement les consignes de Siensano n’étaient pas des clusters sources de contamination.
Rappelons encore qu'en Belgique , aucun outil n’existe pour mesurer et identifier les dits clusters et donc prendre les mesures nécessaires. Continuer dans ce sens, c'est à mon avis aller droit dans le mur et on en est très proche.
Le certificat de quarantaine , une incohérence en matière de santé publique
Lors d’une pandémie, si un gouvernement veut réellement endiguer celle-ci, il doit prendre les mesures justes.
Effectivement ce n'est pas à la population, au citoyen de supporter à titre individuel les coûts d’une politique de santé publique. L’Etat doit mettre les moyens pour arrêter les contaminations. A notre avis les masques, les solutions hydroalcooliques devraient être gratuits (comme la vaccination par ex).
Dans le même contexte, voir un gouvernement créer en urgence un certificat de quarantaine sans en mesurer les effets était irresponsable. Ce certificat de quarantaine permet en effet à l’employeur de ne pas payer le salaire garanti durant la période de quarantaine, vous imaginez le jackpot que cela représente. Heureusement, beaucoup d’entre eux ne l’ont pas utilisé comme tel et ont plutôt mis leur personnel en chômage temporaire (70% du salaire).
Cette situation a précipité de nombreuses familles dans une précarité sans précédent (comme vous pouvez l’imaginer, ce sont évidement les plus bas salaires qui n’ont pas la possibilité de faire du télétravail). Le certificat de quarantaine a également permis aux employeurs de proposer aux travailleurs de déduire ce temps de leurs congés annuels pour maintenir leur salaire à 100% durant cette période. C'est un choc pour les travailleurs des
services publics qui sont sur le front depuis des mois, et qui se voient délester des jours de congés dont ils auraient bien besoin pour récupérer (situation vécue dans les hôpitaux et les maisons de repos).
Le droit de retrait, c’est quoi ?
Oui, il y a bien un "droit de retrait" dans la législation belge. Un droit individuel pour tout travailleur de quitter son poste en cas de "danger grave et imminent" – sans crainte d’être licencié. Le dispositif – méconnu – est détaillé dans une note publiée ce vendredi par le centre de droit public de l’ULB.
Que dit le code du Bien-être au travail à propos du cas de danger grave et immédiat ?
La disposition contenue dans le Code(article I.2-26) prévoit qu’"un travailleur qui, en cas de danger grave et immédiat et qui ne peut être évité, s’éloigne de son poste de travail ou d’une zone dangereuse ne peut en subir aucun préjudice et doit être protégé contre toutes conséquences dommageables et injustifiées".
Jusqu’à cette pandémie, ce droit n’avait jamais été utilisé. Ce sont les conducteurs de bus de la Stib qui l’ont activé lors de la première vague. Lors de la reprise après le confinement, ils se sentaient en danger dans les bus bondés avec peu d’équipement de protection individuelle, des changements de chauffeurs en cabine lors des tournées, alors qu’ils n’avaient pas le temps de les désinfecter, des locaux inadaptés au respect de la distanciation
sociale lors de la prise et de la fin des services.
Le droit de retrait est au départ un droit individuel mais dans ce cas, il est finalement devenu un outil collectif de pression qui a permis d’établir un rapport de force pour contraindre l’employeur à prendre des mesures.
Les travailleurs doivent évidemment, via leurs organisations syndicales, avertir l’employeur qu’ils activent leur droit de retrait et des motifs pour lesquels ils le font.
En conclusion, gérer la pandémie au COVID-19, tient plus d'une responsabilité collective qu’individuelle. Il ne suffit pas au premier ministre de dire en conférence de presse que les mesures prises le sont pour maintenir une vie sociale et la marche de l'économie mais que cela repose sur la responsabilité de chacun, il faut que le gouvernement donne à chacun les
moyens d'appliquer les mesures. Les mesures doivent être prises et appliquées autant dans le milieu du travail que de la sphère privée. L’enjeu est majeur.
(1)SCIENSANO avait publié le 8 mai 2020 une directive (normalement annulée par celle du 1er octobre) qui
prévoyait la possibilité de faire travailler exceptionnellement le personnel asymptomatique en unité COVID
SEULEMENT !!!
https://covid-19.sciensano.be/sites/default/files/Covid19/COVID-19_procedure_hospitals_FR.pdf
Carine ROSTELEUR, secrétaire régionale CGSP ALR Bruxelles
23 octobre 202