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Delen van artikels

Les actions terroristes qui ensanglantent l’Europe depuis une dizaine d’années, en plus des tragédies humaines et des énormes dégâts qu’elles provoquent, mettent au grand jour la terrible faiblesse qui paralyse ce qu’il reste des Etats nations européens.

La lamentable prestation de trois ministres belges Jan Jambon, Intérieur, Koen Geens, Justice, démissionnaires puis « remissionnaires » ainsi que du ministre des affaires étrangères, Didier Reynders, devant les commissions réunies de la Chambre des représentants, confirme ce triste constat. Ils sont incapables de répondre de manière efficace à la menace. En d’autres termes, ils sont inaptes à faire leur travail.

Que s’est-il passé ?

Fort marri de l’attitude de la Belgique lors du Sommet européen des 17 et 18 mars qui a été réticente – à juste titre – à entériner le honteux accord UE – Turquie sur les réfugiés, le « sultan » d’Ankara, Recep Tayyip Erdogan a publiquement attaqué le gouvernement belge après les attentats du 22 mars en révélant que les services turcs avaient averti la Belgique de l’expulsion vers les Pays Bas du futur « kamikaze » de l’aéroport de Bruxelles, Ibrahim El Bakraoui et que les services belges n’avaient pas réagi. Or, ce personnage, condamné pour des faits de grand banditisme, en liberté conditionnelle, connu pour être « radicalisé » revenait de Syrie. Tout d’abord, il n’avait pas répondu aux conditions de la liberté conditionnelle et la Justice belge est restée passive. Ensuite, après avoir atterri aux Pays Bas, il a pu circuler librement en Belgique jusqu’au jour fatal.

 

Un des kamikaze de l'aéroport, Ibrahim El Bakraoui, ébranle post mortem le gouvernement Michel

Et ici, Kafka et Courteline s’allient.

Ce « dysfonctionnement » - savourez l’euphémisme – a déclenché un tollé. Le ministre de l’Intérieur, le NV-A, nationaliste flamand, Jan Jambon et celui de la Justice, le CD & V, chrétien flamand, Koen Geens, présentent leur démission au Premier ministre, le libéral francophone, Charles Michel. Il l’a refuse. La Chambre des représentants décide d’instituer une commission d’enquête sur les attentats de Bruxelles et les commissions de l’Intérieur et de la Justice réunies décident d’interroger les deux ministres le vendredi 25 mars sur les déclarations d’Erdogan. Jan Jambon ne trouve rien de mieux qu’enfoncer un fonctionnaire de police qui était en poste à l’ambassade belge à Ankara et qui aurait mal transmis les informations.

Irresponsables et coupables

Ses deux collègues, Geens et Reynders, sans confirmer, ne contestent pas les affirmations de Jambon. Notons que c’est absolument abject de la part d’un ministre de faire porter le chapeau de ce « dysfonctionnement » à un seul fonctionnaire qui n’est même pas en mesure de se défendre et dont il semble même que sa responsabilité ne soit pas établie.

 

Jan Jambon, Vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur NV-A, Koen Geens, ministre la Justice, CD & V : irreesponsables et coupables.

Quant à l’attentat du métro, on a appris que le gouvernement, contrairement à ce qu’a affirmé Jan Jambon aux commissions, n’a pas aussitôt exigé, dès avoir pris connaissance de l’attaque à Zaventem qui a eu lieu à 7 h 58, de bloquer les métros, les trains et l’ensemble des transports publics. Cet ordre n’est arrivé à la STIB (Société des transports de Bruxelles, équivalent de la RATP parisienne) qu’à 8 h 50 et l’attentat du métro s’est produit à 9 h 11. Ajoutons que la STIB aurait pu prendre l’initiative de fermer le réseau de son propre chef, d’autant plus qu’Infrabel (la société qui gère les chemins de fer) avait bloqué son réseau dès qu’elle a eu connaissance de l’attaque de Zaventem.

Les ministres et plusieurs responsables publics jouent donc le jeu habituel du « responsable mais pas coupable », alors, qu’en réalité, ils sont irresponsables et coupables ! Les sociétés publiques de transport à une exception près étant elles aussi incapables de réagir à l’événement.

Enfin, on a appris que le système Astrid, opérateur télécom dédié aux services de secours et de sécurité en Belgique, a connu de sérieux problèmes de capacité, surtout en Région bruxelloise.

Les systèmes de communication d'Astrid ont été surchargés par la mobilisation exceptionnelle des forces de police, des pompiers, des services ambulanciers, de la défense et de tous les autres services de secours et de sécurité durant la situation d'urgence de mardi 22 mars.

Après l’attentat à l'intérieur de la station de métro, les antennes-relais situées dans les environs ont été saturées. Et, si cela ne suffisait pas, la panne des réseaux GSM commerciaux a entraîné une explosion des communications radio.

L'attentat dans le métro à la station Maelbeek aurait sans doute pu être évité si le gouvernement et les dirigeants des services publics avaient réagi à temps.

La réalité de tout cela : un système qui part en vrille et là, aucun des trois ministres n’a le courage de le reconnaître, aucun des responsables de services publics n’ont pris leurs responsabilités. Les carrières de ces messieurs dames comptent plus que leur honneur et la sécurité de leurs concitoyens ! C’est cela le « dysfonctionnement » ! C’est cela la faiblesse !

Une goutte d’écœurement

Face à ces mensonges, ces dénégations, ces faiblesses, l’indignation monte. On n’analyse plus, on fustige. Heureusement, il y en a qui gardent encore la tête froide. Ainsi, l’ancien journaliste de la RTBF et professeur à l’ULB, Jean-Jacques Jespers qui écrit sur sa page Facebook :

« Mes réserves d'empathie et d'émotion sont épuisées, comme celles de beaucoup d'entre nous. Mais les médias et leurs commentateurs trop loquaces continuent de puiser, puiser... Et pendant ce temps-là je n'entends personne reconnaître que dans tout ce qui arrive, des bombes humaines jusqu'aux lamentables ratés des enquêtes en passant par la panne du réseau Astrid, la principale responsabilité revient aux politiques d'austérité menées par les gouvernements européens depuis des dizaines d'années.

Des politiques néolibérales qui ont amputé sans discontinuer les investissements publics, ce qui a non seulement entraîné le délabrement des infrastructures mais aussi réduit progressivement à la misère, à l'impuissance ou à la marchandisation l'enseignement, la formation, les services sociaux, la justice, les services de renseignement, la police, les médias publics, les CPAS, les hôpitaux, les administrations... et jusqu'aux missions diplomatiques. Et voilà que les dirigeants qui ont délibérément provoqué cette situation se déchargent de leur responsabilité sur les lampistes forcés de se contenter des miettes et les accusent publiquement de manquer de "proactivité" ou "d'engagement"... Il me restait une goutte d’écœurement, la voilà versée. »

 

Jean-Jacques Jespers exprime avec lucidité son écoeurement devant l'impéritie des pouvoirs publics et les politiques d'austérité qui ont mené à cette catastrophe.

Les derniers gouvernements ont cautionné avec zèle les politiques d’austérité qui visent à dégraisser l’Etat aussi bien dans ses fonctions sociales, économiques que régaliennes. La Justice est devenue une coquille vide, les Palais de Justice des taudis, les services de police sont dépourvus de moyens, de personnel entraîné et d’un commandement efficace, les services de secours sont sous-équipés et mal entraînés, l’enseignement est devenu incapable de remplir sa mission. Tout cela au seul profit des entreprises transnationales qui œuvrent à transformer notre société libre et solidaire en un vaste espace marchand.

D’autre part, les six réformes de l’Etat qui ont démantelé l’Etat Belgique ont créé des institutions hybrides dont les compétences se chevauchent, disposant de moyens insuffisants et se concurrençant tout en se livrant au gaspillage. Ainsi, Bruxelles est devenu comme l’écrit Merry Hermanus, l’ancien secrétaire général d’une de ces institutions, la Communauté française, un « mille feuilles institutionnel » où l’inefficacité règne en maître, sans compter les prébendes d’une caste de « hauts » fonctionnaires issus des trois grands partis politiques.

Avec cet imbroglio, il était bien sûr impossible de répondre efficacement aux conséquences des attaques du 22 mars. L’aéroport de Zaventem se trouve en région flamande et dépend à la fois de l’Etat fédéral pour la sécurité et la réglementation de la circulation aérienne, d’une société privée pour la gestion des installations dont l’aérogare, les services de secours sont du ressort de la Région flamande. À Bruxelles, les transports publics sont de la compétence régionale, mais la sécurité générale est du ressort de l’Etat fédéral (ministère de l’Intérieur), la police dans tout le Royaume est à la fois fédérale et locale. Les secours dépendent à la fois de la Région et des Communautés, etc.

Alors, comment voulez-vous que cela fonctionne avec le néolibéralisme et le soi-disant fédéralisme à la belge ?

Comment voulez-vous que cela fonctionne lorsque notre politique étrangère est systématiquement alignée sur celle des néoconservateurs anglo-saxons au service du complexe militaro-industriel ?

Un exemple : dans le cadre du remplacement des chasseurs bombardiers F16 qui opèrent dans le cadre de l’OTAN en Irak et en Afghanistan, il est de plus en plus question d’opter pour le F35 américain qui a un coût exorbitant, dont la technologie et même le contrôle opérationnel dépendent des seuls Américains et qui, plus est, est moins performant que le vieux F16 !

 

Le chasseur bombardier F35 que les Américains veulent fourguer à la Belgique est moins performant que les vieux F16 !

En plus, le gouvernement réactionnaire de Charles Michel semble s’orienter, suite à une demande du gouvernement US, vers une intervention des F16 en Syrie ! On dirait vraiment que l’on souhaite de nouveaux attentats…

Vraiment, ce gouvernement collectionne les bourdes, mais les responsables locaux ne font guère mieux.

Casuals, les SA de la NV-A ?

Par exemple, le dernier cafouillis : la manifestation contre la peur prévue dimanche 27 – curieuse initiative d’un jeune attaché parlementaire – a été fortement déconseillée par Yvan Mayeur, le bourgmestre de Bruxelles et Jan Jambon, sous prétexte que la police était débordée par l’enquête sur les actes terroristes. Mais elle n’était pas débordée la veille lors du rassemblement de 12.000 personnes au Heysel pour écouter Johnny Halliday. Décidément, ah que Johnny devient le spécialiste quasi officiel en hommages aux victimes des attentats en France et en Belgique !

 

Johnny Halliday à Bruxelles devant 12.000 personnes. La police était disponible pour ce concert...

Et puis, comme l’a dit une passante à une chaîne de télévision : l’émotion empêche de réfléchir. Il est vrai que cette compassion hypermédiatisée interdit tout débat sérieux. L’unanimisme est dangereux, car il peut mener à des dérives sérieuses. Rappelez-vous les conséquences de la « marche blanche » de 1996 : une réforme des polices qui n’a fait que renforcer l’appareil répressif au détriment du peuple.

En plus, la police de Bruxelles a trouvé assez d’hommes pour escorter les quelque 400 fascistes de Casuals united Belgium, un soi-disant club de supporters de foot qui est en liaison avec les néonazis du bloc identitaire français et de Pegida en Flandre, qui voulaient en découdre avec les citoyens rassemblés à la Bourse en hommage aux victimes. Ils provenaient d’Anvers et de Vilvorde. Le bourgmestre (socialiste !) de Vilvorde a refusé de leur interdire de monter dans le train pour Bruxelles sous prétexte qu’il ne fallait pas « frustrer » ces jeunes. Ah ! Les pauvres petits ! N’oublions pas en passant : ces gens-là par leur violence nous interdisent aussi de réfléchir !

 

Causals United Belgium dans ses oeuvres à la Bourse de Bruxelles. La SA de la NV-A ?

Tous les partis ont condamné les exactions de ces « braves » jeunes-gens, sauf… la NV-A, le parti nationaliste flamand du ministre de l’Intérieur Jan Jambon et dirigé par le bourgmestre d’Anvers, Bart De Wever. Casuals jouerait les SA de la NV-A qu’on ne serait guère surpris.

 

Le logo de Casuals United Belgium. Le graphisme laisse peu de doutes sur la "philosophie" de ces jeunes-gens...

Attentats prévisibles, lamentable gestion des secours par les autorités – heureusement que les gens de terrain ont fait preuve d’un professionnalisme admirable, fuite devant les responsabilités.

En dépit des évidences, la même politique d’austérité est appliquée partout, voire renforcée. Attendez-vous à des coups de crosse de la Commission européenne sur les dépenses excessives du gouvernement belge qui ne trouvera comme réponse que de tailler encore plus dans les budgets sociaux et ceux des services publics.

Cette systématique destruction de l’Etat est le véritable fléau. Cette déconnection entre les « élites » et le peuple est une menace majeure. Il faut trouver les moyens de riposter. C’est à cette réflexion qu’Uranopole, dans le modeste cadre d’un petit blog, vous invitera bientôt.

Pierre Verhas  - (publié antérieurement sur uranopole.over-blog.com le) 28 mars 2016