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EnergieplakkaatC

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Il n’y a pas d’emploi sur une planète morte. Le dérèglement climatique et la destruction de l’environnement surdéterminent désormais toutes les luttes syndicales. Inversement, les syndicats doivent intégrer comme une seule et même lutte l’écologie et la justice sociale, et peser de toutes leurs forces pour réaliser la transition sociétale exigée par le mouvement climatique.

Ce mercredi 20 février, 300 scientifiques ont appelé à rejoindre la grève mondiale pour le climat du 15 mars. Le lendemain, après leur marche, Youth for Climate, Students for Climate, Teachers for Climate et Workers for Climate ont appelé l’ensemble des syndicats à déposer des préavis pour cette grève.

Les différentes composantes syndicales ont répondu à ces appels de manières diverses. Certaines centrales comme la Centrale Générale de la FGTB et la CNE ont déposé un préavis de grève ou couvriront leurs membres. Mais ni la FGTB ni la CSC ni la CGSLB, tout en soutenant la mobilisation et en appelant à la rejoindre, n’ont souhaité lancer une grève générale le 15 mars. Ce qui a fortement déçu certains jeunes marcheurs et suscité l’incompréhension d’une partie du mouvement climatique.

Au-delà de ces appels à la grève, la question est de savoir si chaque composante de la société se hisse aujourd’hui à la hauteur de l’effort « adéquat » face à une menace existentielle. Pour les partis, gouvernements, pouvoirs publics, fédérations d’entreprises, syndicats, associations et groupes citoyens, « Ne rien faire » pour rester dans le déni, « faire un petit peu » pour se donner bonne conscience et « faire beaucoup » pour pouvoir se féliciter et donner des leçons, restent trois attitudes insuffisantes. Car le dérèglement climatique étant déterminé par les lois de la physique, seule la volonté « d’en faire assez » est satisfaisante.

Toutes les composantes sociétales sont donc mises face à leurs responsabilités. Le seul test de réalité de la volonté collective est la forte réduction et l’annulation le plus vite possible avant 2050 de nos émissions de gaz à effet de serre. Tant que la trajectoire de nos émissions ne permet pas d’atteindre cet objectif, chacun doit se demande si prétendre faire beaucoup, depuis longtemps et avec conviction est de l’euphémisme ou du déni. Nous ne pourrons être satisfaits que lorsque nous en aurons collectivement fait assez, et que les émissions de GES baisseront effectivement et significativement.

15.000 scientifiques nous l’ont rappelé fin 2017 : « Pour prévenir une misère généralisée et une perte catastrophique de biodiversité, l’humanité doit mettre en pratique une alternative plus environnementalement soutenable que le statu quo. Bientôt, il sera trop tard pour dévier notre trajectoire de sa course à l’abîme, et le temps commence à manquer. » Sans modification de la trajectoire mondiale, nous vivrons un dérèglement climatique incontrôlable qui rendra futile toute tentative de garantir la stabilité de l’économie, l’emploi et le bien-être des travailleurs, en particulier pour les personnes les plus fragilisées. Californie, Floride, Australie, Sud de l’Europe, Afrique, Moyen-Orient, Asie, chacun peut déjà observer les gigantesques territoires déjà ravagés par la sécheresse, les incendies, les inondations, les canicules, les ouragans. Chacun peut constater que des secteurs économiques entiers sont frappés de plein fouet, que des milliers d’emplois sont menacés et détruits, et que de nombreuses vies sont fauchées. Pensons-nous que nous serons épargnés ? Que ferons-nous quand il fera 50°C en Belgique, qu’il n’y aura plus d’eau pour refroidir les réacteurs nucléaires, nourrir le bétail et faire pousser nos récoltes ?

C’est vrai, les jeunes ne connaissent pas bien les syndicats…

« Les jeunes comprennent-ils la réalité syndicale ? Ont-ils conscience de la signification d’une grève générale, de son coût ? Ont-ils conscience des impacts de la transition sur l’industrie et l’emploi ? » Oui, mais avons-nous bien compris l’urgence climatique et environnementale ? Avons-nous bien conscience de la signification d’une planète-étuve et de son impact sur l’industrie et l’emploi ? Qu’est-ce qui est le plus important : la vie ou le salaire ? Y aura-t-il encore de l’emploi sur une planète morte ? Dans une des économies parmi les plus riches du monde, ne doit-on pas ajouter la question du plafond environnemental à celle du plancher social quand on discute de pouvoir d’achat ?

« Ne dites pas aux syndicats ce qu’ils doivent faire et comment, ne nous faites pas la morale, et ne nous donnez pas de leçons. Les syndicats ont fait énormément pour l’environnement et le climat depuis 30 ans, et continuent à s’investir énormément. » Oui, mais alors pourquoi les émissions continuent-elles d’augmenter ? Ne faut-il pas changer d’urgence de stratégie face à cet échec sociétal collectif, alors que les rapports du GIEC s’accumulent depuis 30 ans ? Comment les syndicats peuvent-ils faire bénéficier le mouvement climatique, les jeunes en particulier, de 150 ans d’expérience victorieuse de la lutte collective en matière sociale ?

« Il ne faut pas casser la courroie de transmission avec le mouvement climatique, les syndicats sont de gros navires qui virent lentement. Certaines composantes syndicales ont encore du mal à intégrer la lutte environnementale dans leur action. » Mais alors que faire pour que cette courroie de transmission tourne plus vite face à l’urgence climatique ? Comment convaincre l’ensemble des composantes syndicales de l’urgence climatique ? Comment abandonner sans regrets l’économie à base d’énergie fossile, le productivisme, le matérialisme, l’accent mis sur le pouvoir d’achat quantitatif, pour rediriger la lutte syndicale vers une production et une consommation limitées, locales, durables, qualitatives, une redistribution des ressources et un accent sur la qualité de vie et le bien-être ?

« La mission des syndicats est de lutter d’abord pour les travailleurs, l’emploi, les conditions de travail, le salaire, les pensions et la santé, et par ailleurs de s’occuper de l’environnement. » Oui, mais quid si le rapport de force historique capital versus travail sortait progressivement du cadre auto-institué par le capitalisme, pour se réorganiser principalement, sous la pression des limites de la planète, entre ceux qui veulent vivre versus les adeptes du statu quo? Comment intégrer les limites de la planète et redéfinir les termes de la lutte syndicale, dont la pensée trouve ses racines aux XIXe et XXe siècles ? Comment prendre acte du fait que le dérèglement climatique et la destruction environnementale, si on examine leurs conséquences, deviennent les plus grandes menaces au bien-être social et humain au XXIe siècle ?

« Certains syndicats défendent les intérêts de travailleurs au sein d’industries parmi les plus émettrices de gaz à effet de serre, et sont pris dans un dilemme entre le climat et les milliers d’emplois fournis. »

« Certains syndicats défendent les intérêts de travailleurs au sein d’industries parmi les plus émettrices de gaz à effet de serre, et sont pris dans un dilemme entre le climat et les milliers d’emplois fournis. » Oui, mais nous avons fermé les mines de charbon et remplacé depuis ces milliers d’emplois. Et la transition sociétale va nécessiter de former des milliers de travailleurs et de créer des milliers de nouveaux emplois. Doit-on menacer la vie pour préserver l’emploi ? Comment accompagner cette transition économique en limitant la casse sociale ?

Quel doit être le discours politique dominant ? Celui de la peur face aux risques de l’action et du changement ou celui de la peur face au risque de l’inaction et du statu quo ? Peut-être ni l’un ni l’autre ? Renforçons plutôt notre volonté et notre détermination collectives pour réaliser la transition sociétale urgente ! Agissons et changeons ce qui doit l’être !

Jeunes et moins jeunes, jamais nous ne pourrons être assez reconnaissants de 150 ans de luttes syndicales pour nos acquis sociaux. Plus que jamais aujourd’hui, nous avons besoin des syndicats pour défendre ces acquis sociaux. Jamais cependant l’Humanité n’a fait face à une menace plus urgente et plus grave à l’encontre de nos conditions de vie. Nous pensons qu’il n’y aucune contradiction entre la lutte syndicale historique, revendicative, immédiate, et la lutte politique, urgente, mais de longue haleine, pour l’enjeu existentiel du climat et de l’environnement. L’alignement des intérêts de la société civile et des syndicats est total. Alors nous ne pourrons nous satisfaire que de l’union de toutes les forces du mouvement syndical et du mouvement climatique.

Les scientifiques, en enfreignant leur devoir de réserve, et les jeunes marcheurs, en brossant leurs cours, ont déjà démontré leur volonté de lutter jusqu’au bout pour cet enjeu existentiel. Aujourd’hui, comme toutes les composantes de la société, les syndicats doivent choisir : soit ils se jettent corps et âme dans la bataille politique pour un climat propice à la vie sur Terre, soit leur tiédeur risque de favoriser le statu quo. Chacun doit se mettre en danger.

Que peuvent et que doivent encore faire les syndicats ? Rencontrer les jeunes pour le climat ? Renforcer leur action au sein du mouvement climatique ? Peser de toutes leurs forces pour la grève mondiale pour le climat du 15 mars ? Être prêt à faire grève au finish pour le vote de la loi spéciale climat ? Exiger des prochaines majorités qu’elles fassent de la transition sociétale leur première priorité ? Il n’appartient qu’aux syndicats eux-mêmes d’y répondre. Un grand pouvoir implique une grande responsabilité. La grève générale est un symbole fort dans l’histoire syndicale, et un geste coûteux pour les caisses des syndicats. Oui, mais l’enjeu climatique est une menace existentielle pour nous tous, qui nous coûtera beaucoup plus cher, éventuellement la vie, les jeunes l’ont bien compris. Cette semaine, afin de dissiper les doutes, peut-être les syndicats doivent-ils prendre la peine d’expliquer au grand public pourquoi la grève générale n’est pas possible ou pas une bonne idée ou pas la meilleure idée pour défendre notre climat et notre environnement. Et changer d’avis avec grâce le cas échéant !

Les syndicats ne doivent pas se vexer : les scientifiques et les jeunes ont peut-être appelé à la grève pour le climat sans connaître toutes les subtilités de ce mode d’action syndicale, en ignorant leur stratégie générale pour le climat. Mais ils doivent aussi se réjouir, car ces appels sont autant d’hommages à la lutte historique des syndicats, facteur de progrès depuis 150 ans dans notre pays. Nous savons tous que sans les syndicats, il n’y aura pas de transition sociétale. C’est pourquoi les syndicats et le mouvement climatique peuvent et doivent encore faire converger davantage leurs forces pour exiger et obtenir des politiques suffisantes face au dérèglement climatique !

Source: http://pierre-eyben.be/quest-ce-qui-est-le-plus-important-la-vie-ou-le-salaire-y-aura-t-il-encore-de-lemploi-sur-une-planete-morte/